À côté des reines officiellement régnantes, ou régentes, certaines femmes, qui certes ont d'abord et avant tout régné sur les cœurs – et les plaisirs - des rois, ont pu influencer, peu ou prou, la conduite des affaires. Une condition généralement indispensable était qu'elles fussent reines de beauté ! Dans la panoplie des atouts nécessaires, figure, en second lieu, une bonne dose d'ambition.
La liste de ces reines de coeur et de beauté est longue, et il faut encore, malheureusement, choisir. Il est impossible de ne pas retenir Madame de Maintenon et Madame de Pompadour. Mais avant elles, il ne faut pas, non plus, oublier Diane de Poitiers, la "plus que reine", comme on l'appelait.
La favorite du roi Henri II avait 20 ans de plus que lui. Elle avait d'ailleurs commencé par être sa gouvernante et faire son éducation, à la demande de François 1er, alors que le dauphin avait une dizaine d'années. Une tâche qu'elle reproduira plus tard avec les propres enfants d'Henri II et Catherine de Médicis.
Cet écart ne comptera pas, car l'âge n'avait pas de prise sur Diane. Il faut dire que c'était une sportive accomplie. Elle chassait, telle la déesse de l'antiquité dont elle avait le nom et la beauté, pratiquait l'équitation quotidiennement, et – ce qui ne serait venu à l'idée de personne – prenait chaque jour un bain – un bain d 'eau froide, qui plus est. A la belle saison, lorsqu'elle résidait au Château de Chenonceau – l'un des cadeaux de son royal amant – elle allait, au petit matin, se baigner dans le Cher à partir d'un escalier dérobé qui y conduisait directement.
Tous ces exploits - dont on reconnait aujourd'hui les mérites, ce qui n'était pas le cas à l'époque - entretenaient la forme et la beauté de Diane. Elle aurait sans doute dû s'en tenir là. On sait maintenant qu'elle avait aussi recours à un élixir de jouvence, une concoction à base d'or, qu'elle buvait chaque matin au réveil. Cette surconsommation l'a probablement empoisonnée, ainsi que l'a révélé une analyse récente de ses cheveux.
Henri consultera Diane sur toutes les questions importantes du royaume, et il l'aimera pendant 20 ans, jusqu'à la lance fatale de Montgomery. Il signait ses lettres enflammées : "celui qui vous aime plus que lui-même".
La vie de Madame de Maintenon est un roman. Petite fille d'Agrippa d'Aubigné, elle épousa un autre poète, Scarron, invalide et largement plus âgé qu'elle, qui la sortira de sa condition désargentée, et du couvent.
Cette union lui ouvre les portes des cercles culturels, qui se forment à l'époque autour de personnages comme Madame de Sévigné, dans le Marais. Elle est alors remarquée par la favorite de Louis XIV, Madame de Montespan, qui lui demande d'être la gouvernante des enfants illégitimes qu'elle a eus avec le roi (on dirait que l'histoire se répète !). Une position stratégique dans l'environnement du roi ! Sa douceur envers ses enfants émeut Louis XIV. Sa résistance à son égard attise ses désirs. 6 mois après la mort de Marie-Thérèse, elle épouse secrètement le roi !
La cour, sous l'influence de la marquise de Maintenon, perd son éclat, et gagne en ordre et en rigueur. La nouvelle épouse convertit le roi-soleil à la piété. Elle le pousse à prendre la défense de l'Eglise. L'a-t-elle aussi poussé à révoquer l'édit de Nantes ? On l'a beaucoup dit, notamment ses contemporains, qui ne l'aimaient pas. Mais les historiens sont aujourd'hui plus nuancés.
Après la mort de Louis XIV en 1715, elle se retire à St-Cyr où elle avait créé une école pour jeunes filles nobles et pauvres. Elle y mourra et y sera enterrée 4 ans plus tard. Déterrés par les révolutionnaires en 1793, retrouvés pendant la seconde guerre mondiale, ses restes reposent aujourd'hui sur le site même où elle avait choisi de finir sa vie.
A l'instar de Madame de Maintenon, Madame de Pompadour, née Poisson, a peu à peu escaladé les marches du pouvoir. Pour cette femme ambitieuse, Mme de Maintenon est un modèle, qu'elle essaye d'égaler, voire de surpasser. Sa longévité au sommet du royaume est également remarquable : 20 ans !
Dès leur première rencontre, Louis XV tombe sous le charme de cette très belle jeune femme, qu'il installe dans le château même de Versailles. Il lui offrira par la suite d'autres résidences, dont l'hôtel d'Evreux à Paris, futur palais de l'Elysée.
Madame de Pompadour est une véritable femme d'affaires, très dépensière, mais également une muse, et une mécène. Elle aime s'entourer de belles choses, et revoit le décor des propriétés royales, grâce aux artistes qu'elle soutient, créant le "style Pompadour". Elle est à l'origine du développement de la Manufacture de Sèvres, qui assurera le rayonnement de la France en Europe – jusqu'à ce jour. Elle s'entoure des philosophes Voltaire, Diderot et d'Alembert, dont elle encourage la publication de l'Encyclopédie.
De santé fragile, elle cessera rapidement d'être la maîtresse du roi, (dont elle organisera alors les plaisirs dans le fameux Parc aux Cerfs), mais restera son amie. Sa mort, dans l'enceinte même du château de Versailles (fait rarissime), causera un immense chagrin à Louis XV.
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