Les Reines Remarquables

Au cours de son histoire, et malgré la loi salique, la France a été gouvernée par de grandes reines, qui n'ont pas joué qu'un rôle d'épouse de roi. La place manquerait pour les évoquer toutes, et oblige à faire des choix. Toutes ne sont d'ailleurs pas passées à la postérité, ou alors pour de curieuses raisons. Mais commençons par le début, qui débute en l’occurrence au 6ème siècle. Il fallut en effet attendre le 6ème siècle pour voir une femme au pouvoir.

La première reine de France fut Brunehilde, plus connue sous le nom de Brunehaut . Et pour un coup d'essai, ce fut un coup de maitre-sse. Elle unifia le royaume que son époux Sigebert, petit-fils de Clovis et les rois frères de ce dernier avaient morcelé, démantelé. Et pourtant, les embûches, intrigues et trahisons de toute sortes ne l'avaient pas épargnée.

Un siècle plus tard, une autre reine est passée à la postérité sous une drôle de dénomination : Berthe au grand pied.

 

Berthe au grand pied

C'est vrai, Bertrade, fille d'Héribert, comte de Laon et de Gisèle d'Aquitaine, avait un pied (un seul) un peu plus grand que l'autre. Ce qui n'enlevait rien à son pouvoir de séduction. Alors qu'elle n'a que 19 ans, Pépin le Bref tombe d'ailleurs éperdument amoureux d'elle, et n'hésitera pas à abandonner femme légitime et enfants pour vivre à ses côtés.
De cette union adultérine, et peu banale, naîtra notamment un grand roi, comme son nom l'indique : Charlemagne.

Berthe au grand pied a une tête bien faite, et beaucoup d'ambition ! Elle se battra pour obtenir le sacre de son union pécheresse avec Pépin par le pape, et la légitimation de leurs bâtards! Ne dit-on pas :"ce que femme veut, Dieu le veut " ? Elle tâchera aussi d'influencer son fils préféré et d'assurer son autorité sur le trône, jusqu'à ce que ce dernier lui demande de cesser de tirer les ficelles politiques en son nom !

L'Histoire a tendance à oublier ces hauts faits pour se concentrer sur un détail de son anatomie ! Heureusement pour elle, de son vivant (et à sa mort), elle n'aura pas affaire à des ingrats. Elle sera toujours adulée par Pépin qu'elle accompagnera dans toutes ses entreprises, et par le peuple français. Elle sera respectée par Charlemagne, qui lui offrira de somptueuses funérailles et la fera ensevelir en grande pompe, dans la basilique de Saint-Denis, aux côtés de son époux.

Il y aura ensuite Blanche de Castille, Isabelle d'Aragon, Eléonore d'Autriche, mais les deux reines qui auront le plus marqué leur époque, et laissé l'empreinte la plus durable à Paris, sont deux Italiennes : Catherine et Marie de Médicis.

Catherine de Médicis (1519-1589)

Ilvec Catherine de Médicis, on est loin de la soumission féminine. Certes, elle devra s'effacer devant sa rivale, Diane de Poitiers, jusqu'à la mort de son époux le roi Henri II, mais elle saura ensuite prendre sa revanche, et éloigner à jamais de la cour la belle Diane. À la suite de cette tragédie, elle décidera aussi de raser la résidence royale des Tournelles, associée à cet événement tragique dans le Marais - ce qui permettra plus tard à Henri IV d'ériger à sa place la magnifique place des Vosges - et elle s'habillera de noir jusqu'à la fin de sa vie. Depuis, le deuil a cette "couleur".

Mais la mort accidentelle d'Henri II, intervenue au cours du tournoi organisé pour le mariage de leur fille, sera surtout l'occasion de révéler ses qualités de régente. Et l'époque est tout sauf facile ! Elle est minée par les conflits entre Catholiques et Protestants, qui culmineront avec ce crime de masse qu'est le Massacre de la Saint-Barthélémy (le Paris du Crime !). On l'accusera longtemps de l'avoir organisé. Plus récemment, certains historiens l'en ont dédouanée. Ce qui s'est réellement passé (et le véritable commanditaire du massacre) reste un des mystères de l'Histoire, tellement compliquée, et intéressante de ce fait même !

À sa décharge toujours, même lorsqu'on est une mamma italienne, il n'est pas simple d'être la mère de 3 futurs rois, et la belle-mère d'un 4ème (Henri IV), tous morts avant elle (pratiquement), et de façon plus ou moins violente.

Drôle de destin, donc, que celui de cette reine, mariée à l'âge de 15 ans à peine à l'héritier du trône français, par le jeu de ces alliances habituelles au sommet des royaumes, longtemps accusée d'infertilité avant de donner naissance à 10 enfants, et amenée, par le jeu des circonstances, à gouverner la France pendant une trentaine d'années. Il a bien fallu faire preuve de détermination et déplaire à certains ! Ce qui lui a valu sans doute, et injustement, cette légende noire attachée à sa personne.

Ses responsabilités à la tête du royaume ne l'ont pas empêchée, en tous cas, en bonne héritière des Médicis, d'accorder une place très importante aux arts sous toutes leurs formes, et de protéger artistes et écrivains ! Hélas, il ne reste rien des monuments qu'elle a fait construire (quelques vestiges étonnants , néanmoins, dans le parc Monceau ) et les œuvres picturales qu'elle a commandées à des artistes italiens et français ont malheureusement été dispersées.

 

Marie de Médicis (1573 - 1645)

Fort différente est Marie de Médicis, qui épousa en secondes noces Henri IV, après que celui-ci ait répudié Marguerite, fille d'Henri II et de Catherine de Médicis, dont Marie est une lointaine cousine ! Le monde est vraiment petit !

Marie n'est ni aussi intelligente, ni aussi avenante que Catherine, mais elle est riche. En l'épousant, en 1600, Henri IV épouse une dot de 600.00 écus d'or , dont le royaume avait bien besoin !

Mal entourée, superstitieuse, Marie s'accrochera au pouvoir lorsqu'il lui reviendra de droit, 10 ans plus tard, après l'assassinat d'Henri IV – dont certains l'accuseront. Au point que son fils, le roi Louis XIII, devra se résoudre à l'exiler, pour pouvoir régner en maître.

Heureusement pour nous, Marie de Médicis reviendra à Paris pour quelques années, le temps, comme sa cousine, de protéger les artistes, et aussi, et peut-être surtout, de faire construire cette merveille de style Renaissance qu'est le Palais du Luxembourg, entouré par un jardin magnifique, et iconique. 400 ans plus tard , il fait toujours bon se promener au "Luco", et le clou de ce jardin, la fontaine de Médicis, véritable bijou, nous transporte avec bonheur en Italie, une Italie qui sera toujours chère au cœur de ces deux reines de France.

© P. Malzieu – tous droits réservés